Les Indicateurs SST, piliers du tableau de bord idéal en Santé, Sécurité et Conditions de Travail

Les Indicateurs SST, piliers du tableau de bord idéal en Santé, Sécurité et Conditions de Travail

Une prévention active permet de supprimer ou tout au moins de réduire de manière sensible les impacts humains du travail. Non seulement cette prévention est favorable à la santé et à la sécurité des salariés, mais elle est également très rentable pour l’employeur, car elle réduit considérablement les coûts directs, indirects et cachés, ce que l’on appelle des externalités négatives. Pour cela, la gestion des risques professionnels et la préservation des conditions de travail nécessitent l’utilisation d’indicateurs SST (Santé, Sécurité au Travail) spécifiques, adaptés aux réalités de chaque secteur d’activité, voire de chaque entreprise.  Ces indicateurs SST, bien choisis et intégrés dans la vie de l’entreprise, deviennent des outils puissants pour anticiper les risques, promouvoir le bien-être des salariés et optimiser les performances de l’organisation. Toutefois, leur efficacité dépend non seulement de leur pertinence, mais aussi de la manière dont ils sont utilisés et vécus au sein de l’entreprise. 

Les indicateurs SST liés à la santé au travail visent à évaluer l’impact des conditions de travail sur la santé physique et mentale des employés. Ils incluent : 

  • Nombre d’accidents de travail : Un indicateur central qui permet de mesurer la fréquence des incidents ayant entraîné des blessures ou des incapacités. Sur ce plan, il faut veiller à ne pas subir les stratégies de sous-déclaration que l’on retrouve encore trop souvent. Cette minoration est pénalisante pour les victimes. 
  • Taux de maladies professionnelles : Indique le nombre de maladies reconnues comme étant causées par le travail, telles que les troubles musculosquelettiques (TMS), les maladies respiratoires, les cancers professionnels, par exemple dus à l’amiante ou les pathologies psychiques liées au travail dont la reconnaissance est très difficile encore aujourd’hui en l’absence de tableau de maladies professionnelles. Aussi, il convient de compléter cet indicateur par une analyse de l’absentéisme de longue durée, ainsi, un burn-out s’accompagne souvent d’un arrêt maladie de 9 mois en moyenne, un management toxique génère des arrêts maladie de courte durée mais répétitifs. 
  • Taux de passage à la médecine du travail ou à l’infirmerie : Mesure la sollicitation des services spécialisés en santé, permettant de détecter précocement des problèmes de santé. 

Les indicateurs SST orientés sécurité visent à prévenir les accidents et à améliorer la protection des salariés. Parmi les plus pertinents, on trouve : 

  • Taux de fréquence des accidents : Nombre d’accidents par nombre d’heures travaillées, utile pour comparer la sécurité entre différentes entreprises ou secteurs. Là encore, une attention sera portée à la dérive de la sous-déclaration. La déclaration peut entraîner une hausse des taux de cotisation ATMP versés par l’employeur. 
  • Taux de gravité des accidents : Mesure la sévérité des accidents en fonction du nombre de jours d’arrêt de travail. 
  • Nombre de jours d’arrêt de travail liés à des accidents : Évalue l’impact des incidents sur la continuité des activités et la productivité. 
  • Mises à jour des plans de sécurité et du DUERP : Indicateur de l’adaptation continue (ou pas) des mesures de sécurité en fonction des nouveaux risques identifiés. 

Les indicateurs SST relatifs aux conditions de travail permettent d’évaluer l’environnement de travail, les relations professionnelles, et la qualité de vie au travail : 

  • Taux d’absentéisme : Peut indiquer des dysfonctionnements dans l’organisation, un stress excessif, ou des conditions de travail dégradées. 
  • Taux de rotation du personnel : Mesure la fidélité des employés à l’entreprise, souvent corrélée à leur satisfaction et à leurs conditions de travail. 
  • Égalité professionnelle et diversité : Indicateurs sur l’inclusivité, la non-discrimination et la promotion de la diversité au sein de l’entreprise. On peut y ajouter un indicateur spécifique pour le suivi des personnels en situation de handicap, voire pour les aidants sociaux. 
  • Satisfaction des employés : Des mesures de la perception qu’ont les employés de leurs conditions de travail, leur charge de travail, et l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle peuvent exister au sein des entreprises. La prudence est requise en ce qui concerne certains labels qui laissent entendre qu’il fait bon travailler au sein de l’entreprise à partir de critères discutables (souvent du déclaratif de quelques personnes) et qui cherchent à donner une image tronquée de l’entreprise à l’extérieur. À ces démarches dissimulatrices, manipulatrices et pour finir dangereuses, on préfèrera des baromètres élaborés « sur mesure » en faisant appel à des experts habilités par le ministère du Travail (comme le cabinet Technologia).

La grille des indicateurs SST retenus pour finir ne doit pas être simplement imposée ou appliquée de manière rigide. Sa pertinence dépend du métier, du secteur d’activité, et des risques spécifiques auxquels les employés sont exposés. Par exemple, dans le secteur tertiaire, les risques psychosociaux (comme le burn-out) sont souvent prédominants. En revanche, dans l’industrie, les accidents du travail ou les maladies professionnelles (comme les TMS) seront à surveiller de près. 

Les indicateurs SST doivent donc être choisis avec soin, en concertation avec la direction, les représentants du personnel et les services santé et travail, afin qu’ils reflètent fidèlement les réalités du terrain. Ils ne doivent pas être plaqués sur le réel, mais au contraire, aisés de compréhension, signifiants et intégrés de manière dynamique dans la vie quotidienne de l’entreprise. Leur utilisation doit devenir récurrente. Le nombre d’indicateurs doit être pensé pour éviter de noyer la réflexion, de générer de la lourdeur, de la confusion sous le nombre de données, de perdre de vue l’essentiel au profit de l’accessoire et pour contribuer in fine à l’abandon de ce questionnement si indispensable. L’enjeu majeur est le débat qui en résulte dans la durée entre la direction, les élus du personnel, les services de santé au travail ainsi que les plans d’amélioration et de protection qui en découlent en évitant le déni et les stratégies d’évitement. 

L’efficience de ces indicateurs Santé, Sécurité au Travail repose sur une gouvernance éclairée et un dialogue social de qualité. La gestion de la prévention ne peut se faire de manière descendante ; elle doit être le fruit d’une co-construction entre la direction, les responsables SST, et les représentants du personnel qui questionnent les situations délétères de travail et les écarts entre travail prescrit et travail réel. 

En s’emparant des indicateurs SST, le dialogue social joue un rôle clé pour influer sur les pratiques managériales et ajuster les exigences professionnelles, notamment lorsqu’elles sont perçues comme démesurées. L’engagement des salariés et de leurs représentants permet non seulement d’enrichir l’analyse des indicateurs, mais aussi de mettre en place des actions correctives pertinentes, adaptées et acceptées par tous.

Les indicateurs SST, une fois sélectionnés et validés, doivent être discutés et interprétés en continu. Cela implique un suivi régulier, une évaluation des résultats obtenus, et des ajustements en fonction des retours du terrain. La prévention est ainsi conçue comme une partition collective, où chaque acteur joue sa part, pour garantir un environnement de travail sûr, sain et épanouissant. 

On l’aura compris, les indicateurs SST en santé, sécurité et conditions de travail ne sont pas de simples chiffres ; ils sont les outils d’une régulation vivante, qui s’adapte, évolue, et se perfectionne au fil du temps. Leur efficience découle d’une mise en musique collective, où la gouvernance et le dialogue social jouent des rôles essentiels pour créer une culture de prévention durable et partagée.